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1 février 2023

Bitch planet volume 1 de Kelly Sue Deconnick et de Valentine De Landro

Bitch planet volume 1

Présentation des créateurs

Kelly Sue Deconnick

Scénario

Elle débute sa carrière en adaptant des bandes dessinées japonaises et coréennes en langue anglaise pour le marché américain. Cinq ans et plus de dix mille pages plus tard, elle se tourne vers les comics et commence à travailler sur "30 jours de nuit" pour Steeve Niles, chez IDW. Elle travaille ensuite pour la plupart des grands éditeurs américains: Image Comics, Boom! Studio, Oni Press, Humanoids, Dark horse, DC Comics, Vertigo et Marvel. Aujourd'hui, Deconnick est célèbre pour avoir donné à une femme, Carol Danvers, le rôle de Captain Marvel, ainsi que pour le western mythique "Pretty Deadly", nommé au Eisner Awards et co-créé avec son amie et collaboratrice de longue date Emma Rios. Sa dernière série en date, "Bitch Planet", récit de SF coup de poing co-crée et avec le dessinateur Valentine De Landro, fait l'unanimité parmi les critiques depuis son lancement aux Etats-Unis en décembre 2014.

Valentine De Landro

Dessin & couverture

Il rejoint l'univers du comics suite à plusieurs succès bien mérités. D'abord assistant chez Dark Horse Comics (via leur studio de Toronto Bright Anvil), il est très vite contacté par Marvel où il se voit confier les pages intérieures de numéros de "Marvel age spiderman", "Marvel knights: 4" et "X-Factor". Mais créer et développer "Bitch Planet" aux côtés de Kelly Sue DeConnick a entièrement changé le cours de sa carrière. 

Les personnages:

Pénélope dit Penny: Une femme non-conformiste. 

Je l'adore, elle est grosse, elle est sensible, elle est elle-même, elle n'hésite pas à faire usage de la violence si nécessaire. Attention, ce n'est jamais elle qui commence, mais elle n'hésite pas à terminer les conversations à coups de poing.  Penny n'a pas peur d'être vue. Elle ne revendique pas forcément d'être grosse, cependant son droit à exister et à vivre ne peut lui être retirer. Pourquoi devrait-elle se conformer à quelque chose de si subjectif que l'apparence et se limiter? Pourquoi devrait-elle s'excuser de vivre? Ce sont les autres qui ont une idée fixe, qui coupent les ailes aux femmes, pourquoi devrait-elle disparaitre se faire plus petite qu'elle n'est?

Kamau Kogo

On ne sait pas grand chose sur elle. Mais elle est aussi forte que Penny. Elle essaie également de survivre dans ce monde qui a jugé qu'elle n'est pas conforme. Elle est plutôt du genre taciturne, elle observe la situation avant de prendre une décision mais n'hésite pas à venir en aide à celles qui en ont besoin, seulement lutter contre le système qui veut t'éradiquer est difficile quand tu es seule. 

Mon avis:

On plonge dans une dystopie pour les femmes, les personnes handicapées, les personnes non-blanches, les Queer. Un monde rêvé pour bon nombre de personnes qui aimerait tuer, enfermer celles qu'elles jugent différentes. Les femmes blanches et BIPOCS sont les grandes victimes de ce système, un regard mal interprété, un refus, un corps non jugé acceptable, une manière de pensée différente suffit à être envoyée sur Bitch Planet. 

Le Patriarcat* a gagné. Les hommes sont libérés de tous leurs mauvais comportements et de toute valeur morale. Ils sont pris en flagrant délit d'infidélité ou veulent se débarrasser de leur femme, rien de plus simple, il suffit de la déclarer non-conforme et le tour est joué. 

Les normes de beauté sont encore plus limitatifs que maintenant. Les femmes doivent tout faire pour s'y conformer. Elles doivent rester jeunes et minces. La chirurgie a l'air de faire partie des basiques de cette société. Les réseaux sociaux ont l'habitude de définir les tendances beauté et de mettre en avant telle ou telle technique pour maigrir. Les corps à la mode sont décidés par les influenceuses qui n'hésitent pas à mettre en lumière des pratiques dangereuses pour atteindre ce corps rêvé. 
Ici, ce sont les médias mainstreams qui font ce matraquage. Les femmes vivent dans la peur constante. On remarque qu'il y a toujours deux camps qui s'opposent celles qui subissent le patriarcat mais ont décidé que ce système leur convenait et qui s'y intégraient et celles qui décident de rejeter en bloc ce patriarcat. 

Il y a un système de père et de mère mis en place qui infantilisent grandement la population. Le harcèlement de toutes les personnes non-conformes est de rigueur. Si tu ne rentres pas dans la norme, on t'exclura et on se moquera de toi. Les femmes n'ont aucune chance de s'en sortir. Les hommes trouveront toujours de quoi les critiquer. L'agisme et le validisme travaillent main dans la main avec le patriarcat. 
Les hommes peuvent remplacer leur première femme sans qu'on les critique, c'est normal si elle n'était plus conforme. Dans ce monde, notre cher Léonardo Di Caprio pourrait changer de petites-amies quand elles atteignent les 25 ans sans que le monde ne s'en émeut. Dans Bitch Planet, on défend même ce type de comportement. 

Il y a une mise en lumière du système carcérale violent qui enferme sans réel espoir de réhabilitation. Les femmes prisonnières n'ont que le choix de plier ou de pourrir sur la planète prison. 

Le sport est un moyen de contrôler les masses, la violence, la mort les endorment et c'est une bonne chose pour les dirigeants. "Panem et Circenses"  (Du pain et des jeux du cirque) est parfaitement illustré ici. Le Duemila/ Megation doit obligatoirement être suivi par la population. C'est sûrement une manière de créer du "temps de cerveau disponible"² et de rassembler les gens sous une bannière commune. Regarder du sport leur permet de ne pas se pencher sur les problèmes et détourne leur attention de la réalité pendant un temps. 

On voit aussi que la femme qui va trahir Kamau est une femme blanche qui avance à visage découvert pour attirer la sympathie.C'est elle qui se rapproche le plus de la norme et fait en sorte de perpétuer le système car elle y trouve un avantage.  Notre héroïne n'est pas dupe.

J'ai vraiment adoré les illustrations, leur dynamisme. C'est d'ailleurs la couverture qui m'a attirée: l'héroïne noire avec son afro prête à se battre. Puis l'oeil est attiré par les autres femmes. Je n'avais pas compris au premier abord que c'était une prison. Il y a un mélange de couleurs criardes qui nous rappellent les années 90 tout en se projetant dans un futur totalement dystopique pour les femmes et les personnes non conformes. Plus que jamais tu dois rentrer dans le moule et si par ta couleur de peau, tu détonnes il va falloir faire en sorte de t'effacer plus que les autres. 

Le validisme, la grossophobie, le racisme, le sexisme, la queerphobie existaient déjà mais dans cet univers, ils font office de loi. Les dirigeants et les dirigeants ne cherchent plus à faire appliquer leur modèle idéologique fermé de manière implicite, c'est clairement dit et tu seras puni.e en cas de non-conformité. 

Les pages parodiant les publicités et les magazines féminins des années 90 sont hilarants. On retrouve tous les codes et les préoccupations de l'époque que les femmes étaient censées avoir: être mince, avoir un homme, être mince et suivre la mode. Le petit disclaimer signifiant que cela ne fonctionne pas et qu'il est inutile de commander les derniers gadgets m'ont fait sourire. 

L'obsession de la minceur est ridiculisée en montrant une pratique dangereuse et dégoutante comme par exemple "avaler un parasite". En ce moment, les grandes influences d'ânerie conseillent un nouveau produit miracle à savoir s'injecter de l'insuline. Non seulement c'est très dangereux pour la santé mais à cause de cela, il y a une pénurie de médicaments pour les diabétiques. 

Je vais continuer ce petit bijou. Le deuxième tome est disponible en français mais pas la suite, il y a 15 livres au total. C'est dommage pour le public français, c'est drôle, corrosif et cela pousse à la réflexion. 

J'ai hâte de voir les protagonistes évolués. 

 

Bonne lecture à tous et toutes. 

 

 

 Patriarcat: "Le patriarcat est un concept utilisé en anthropologie et en sociologie pour désigner « une forme d’organisation sociale et juridique fondée sur la détention de l’autorité par les hommes, à l'exclusion explicite des femmes »1. Le patriarche y occupe une position mythique de « père fondateur » supposée lui octroyer une autorité et des droits sur les personnes dépendant de lui (femme[s], enfants, famille élargie, subordonnés).

À partir des années 1970, le concept de patriarcat, revisité dans ses fondements théoriques, est notamment utilisé par la deuxième vague féministe pour désigner un système social d'oppression des femmes par les hommes, « système où le masculin incarne à la fois le supérieur et l'universel »2." selon Wikipedia 

 

Temps de cerveau disponible: Le « temps de cerveau humain disponible », selon l'expression formulée en 2004 par Patrick Le Lay, alors président-directeur général du groupe TF1, est ce que la chaîne de télévision TF1 vendait à ses annonceurs : « Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible »1.

 

 

 

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